Ces entreprises qui innovent dans leur politique de rémunération
L’argent : en voilà un sujet à prendre avec des pincettes en France. Salaire unique, transparence, modes de rémunération plus justes, espaces de discussions… Depuis quelques années, des entreprises innovantes viennent remettre l’argent à sa place...
L’argent : en voilà un sujet à prendre avec des pincettes en France. Salaire unique, transparence, modes de rémunération plus justes, espaces de discussions… Depuis quelques années, des entreprises innovantes viennent remettre l’argent à sa place et briser le tabou.
Alors quelles sont les grandes tendances ? Et comment s’en inspirer ?
Nesspay décrypte pour vous ces pratiques et leurs principaux apprentissages à travers des exemples concrets.
La tendance de la transparence des salaires
L’idée ? Mettre au point une grille de salaire accessible à tous les collaborateurs. Le but étant de réduire au maximum les inégalités. Dans certains pays, cette pratique est même devenue obligatoire (par exemple en Norvège ou en Allemagne).
Ces entreprises ont franchi le pas et racontent leur expérience :
- Alan, l’entreprise pionnière en la matière : Avec près de 200 salarié·es, l’assureur de santé a mis en place un système très innovant où il diffuse à la fois la grille de salaire (avec un prix fixe non négociable pour chaque poste) et les promotions en interne. Pour calculer un salaire, deux mesures entrent en jeu : les années d’expérience et le niveau. Comme expliqué dans leur article sur le sujet, “les années d’expériences sont une donnée objective. Le niveau est une classification moins objective. C’est l’estimation de l’impact du salarié·e. Comme il s’agit d’un critère difficile à estimer, on prend des précautions pour être juste : la détermination du niveau est toujours collégiale, elle se fait au fur et à mesure des entretiens et s’il n’y a pas d’unanimité, on choisit le niveau le plus bas parmi ceux proposés”. En parallèle, la structure peut mettre en place des promotions selon la base de l’appréciation des pairs.
- Même son de cloche chez 360Learning : La politique de rémunération de cette plateforme d’apprentissage collectif est motivée par 4 éléments clefs (la responsabilisation, la faible autorité, la simplicité et le zéro biais). À l’image d’Alan, ils utilisent des niveaux pour gérer l’évolution de carrière. Par exemple, si vous recevez une offre pour les rejoindre, vous êtes informé·e du niveau auquel vous appartenez par défaut à votre arrivée. Impossible de négocier ce niveau, qui sera connu de tous les 360Learners. Et réciproquement, vous connaîtrez celui de vos collègues. Pourquoi ce choix ? “Cette transparence nourrit notre cohésion de groupe, nous aide à prendre les meilleures décisions et à rester transparents les uns avec les autres. De cette manière, nous évitons les situations frustrantes” expliquent-ils dans leur publication sur le sujet. À ce jour, l’entreprise construit ses grilles en fonction des données du marché, des pays et de différents groupes (huit pour le moment : une pour les commerciaux, une pour le Business Development, une pour l'ingénierie commerciale, une pour le Service Client, une pour l'IA/le Machine Learning, une pour les équipes Tech généralistes, une pour le Support et l'Administratif et une pour toutes les autres fonctions).
Ce que l’on en retient ? Source de motivation supplémentaire, évitement des rumeurs ou frustrations, responsabilisation des salarié·es sont les principaux avantages de ce type de pratique. Les limites ? Elles sont principalement liées à “l’intensité du travail” si un·e salarié·e estime s’investir plus qu’un·e autre et souhaite être rémunéré·e plus pour cela.
Dans cet article de Maddyness, Romain Kuzniak (CTA d’OpenClassrooms) et Mathilde Callède (DRH de Shine) présentent leur 6 conseils pour appliquer pertinemment la transparence. Leur première suggestion ? Prendre le temps et s’inspirer des autres entreprises. “Avant toute chose, nous avons passé plusieurs semaines à travailler et se documenter sur la question de la transparence des salaires, Shine a mis près de trois mois à sortir une première grille salariale, le temps de trouver l’algorithme le plus approprié” explique par exemple Mathilde Callède.
La tendance du salaire libre
L’idée ? Les salarié·es choisissent eux-mêmes leur rémunération (avec plus ou moins de règles). Derrière ce concept, s’en cache un plus global : celui “d’entreprise libérée”, qui promeut un management différent et sans intermédiaire.
Ces entreprises ont franchi le pas et racontent leur expérience :
- Le cas de Fasterize : Start-up d’une quinzaine d’employé·es, son objectif est d’optimiser les sites web pour augmenter leur rapidité. Adepte du modèle d’entreprise libérée via des vacances et horaires libres, le fondateur Stéphane Rios a poussé “cette liberté au maximum” avec l’auto-évaluation et le choix de la rémunération. Pour cela, les collaborateurs rédigent une lettre pour justifier leur demande d’augmentation. Si besoin, les autres salarié·es peuvent “challenger la demande”. Le résultat ? “Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les gens ont été très raisonnables et les trop raisonnables on a même dû les forcer à s’augmenter davantage” précise-t-il dans cet article. Son conseil pour que cela soit le plus pertinent possible ? “Faire des prédictions, estimer une enveloppe et fixer des éventuels plafonds”.
- Autre exemple intéressant, celui de Lucca : cette “tribu” (comme ils·elles ont coutume de s’appeler), spécialisée dans les logiciels de gestion de ressources humaines a mis en place une organisation horizontale depuis ses débuts. “Ici, le salaire n'est plus tabou, c'est très sain” raconte Tristan, l’un des salariés. Avec une politique de salaire libre, “chacun se responsabilise et s'autocensure” assure Gilles Satgé, le PDG. Plus concrètement, la négociation se fait entre le·la collaborateur·trice et le·la manager. Si le manager trouve la proposition trop élevée par rapport à la valeur de marché, les deux vont chercher un compromis mais c’est toujours le·la salarié·e qui a le dernier mot. Le résultat après des années de pratique ? Un vrai levier de fidélisation. “Seul un collaborateur a démissionné car il se mettait la pression tout seul, il le vivait mal” explique-t’il dans cet article. Selon lui, ce qui peut s’avérer compliqué c’est sur les hauts salaires. Pour montrer la ligne directrice, il se dit être raisonnable sur son propre salaire. Pour découvrir dans le détail leur politique salariale, voici un reportage France 2 à leur sujet.
Ce que l’on en retient ? Responsabilisation du salarié·e, dépassement de soi et climat de confiance sont les gros avantages de cette pratique. Les risques quant à eux sont liés à de potentiels désaccords entre les salarié·es ou alors à un syndrôme de l’imposteur pour celui ou celle qui ne se sent pas légitime de demander un salaire plus élevé. Le conseil de Gilles Satgé pour éviter cela ? Prendre le temps de définir le processus en amont.
En bonus : dans ce podcast, Sarah, salariée, explique comment elle vit au quotidien le fait de fixer librement son salaire.
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La tendance du salaire unique
L’idée ? Une rémunération identique pour tous les salarié·es afin d’avoir une certaine harmonie dans les équipes.
Ces entreprises ont franchi le pas et racontent leur expérience :
- L’exemple de Gravity Payments : Dan Price, fondateur de cette entreprise spécialisée dans le traitement de paiement par carte a mis en place un salaire unique de 70K pour l’ensemble de ses collaborateur·rice·s. Pour y parvenir, il a décidé de baisser le sien (qui était alors de 1,1 million de dollars). "Mon tarif sur le marché en tant que PDG est absurde comparé à celui d'une personne normale. J'ai beau être un capitaliste, il n'y a rien dans le marché qui m'oblige à le faire" explique-t-il dans cet article. Sa conviction ? Qu’avec des salarié·es moins soucieux·ses des problèmes économiques quotidiens, l'entreprise y trouve son compte à long terme. Le résultat quelques années plus tard ? Les bénéfices de l’entreprise ont triplé en six ans. “C’est le meilleur investissement que j’ai réalisé dans ma vie” souligne le fondateur. Des bémols ? Deux cadres ont démissionné reprochant d’augmenter certaines personnes et pas d’autres jugées plus méritantes.
- Le cas de Code Lutin : Cette TPE spécialisée dans les logiciels libres est composée d’une vingtaine de salarié·es. Sa particularité ? Chacun·e touche 2400 euros brut par mois. “Si on enlève notre assistante, l'entreprise ne fonctionnerait pas bien. Chaque personne ici apporte sa contribution, qui, à sa façon, la rend indispensable” explique Yannick Martel, le co-dirigeant de la société.
Ce que l’on en retient ? Cette solution apporte des avantages non négligeables, de type meilleure qualité de vie pour tous ou un environnement de travail sain. En termes de marque employeur, cela permet également d’attirer des talents intéressés par la mission plutôt que par le salaire. Le hic se situe pour les personnes très qualifiées ou avec des compétences rares ou alors pour celles et ceux qui s’engagent beaucoup et souhaiteraient un salaire plus élevé. C’est d’ailleurs ce qu’explique l’entreprise Spill dans cet article, pour laquelle le modèle n’a pas fonctionné. Pour éviter cette faille, réfléchir à d’autres formes de reconnaissance peut être intéressant.
La tendance aux espaces de discussion et aux décisions collégiales
L’idée ? Donner la parole aux salarié·es pour leur permettre de décider de la politique salariale de l’entreprise.
Ces entreprises ont franchi le pas et racontent leur expérience :
- Le cas de Décathlon : L’enseigne sportive s’est lancée dans cette pratique via le “Self decision & Advice Process Remuneration”. En quoi cela consiste-t-il ? Si une personne décide de s’accorder une augmentation de salaire ou une prime, elle doit solliciter ses collègues (5 au maximum) pour obtenir des avis sur la légitimité de sa décision.
- SkillX : Cette entreprise, spécialisée dans le cloud et la cybersécurité a fait le pari d’associer ses collaborateurs à la prise de décision : “C’était naturel pour moi d’adopter un modèle de management libéré, où le collaborateur est au centre de l’organisation. Je voulais que tous mes salariés soient acteurs du projet et des décisions. Je n’envisageais pas de fonctionner différemment” explique Olivier Andoh, le fondateur. En plus du recrutement, les rémunérations et les augmentations se décident également collectivement. Concrètement, voici la marche à suivre pour demander une augmentation : après chaque bilan annuel, la personne voulant être augmentée s’auto-évalue selon trois critères : la satisfaction client, le rôle joué dans le développement de l’entreprise et la bonne santé économique de l’entreprise. Le document est alors partagé à tout le monde puis un comité et un manager se réunissent et prennent la décision.
Ce que l’on en retient ? Là aussi, la responsabilisation des salarié·es et leur motivation sont les principaux avantages. Niveau inconvénients, on peut citer le côté chronophage que cela implique et qui nécessite une organisation en amont. Le conseil d’Olivier Andoh pour y parvenir ? Garder à l’esprit que “nous apprenons en marchant. Il n’y a pas une seule façon de faire et il faut, en permanence, s’adapter au contexte, au niveau de conscience et de confiance des équipes.”
La tendance du salaire à la demande
L’idée ? Permettre aux salarié·es de profiter de leur salaire (pour le travail accompli) avant le paiement prévu à la fin du mois. On parle souvent “d’acompte sur salaire”.
Ces entreprises ont franchi le pas et racontent leur expérience :
- Sushi Shop : Pour Jean-Baptiste Tilloy, Directeur des Ressources Humaines, cela s’inscrit “dans le cadre d'une démarche continue d'amélioration du bien-être au travail, pour offrir à [nos] salarié·es une solution innovante, pratique et moderne de gérer leur salaire tout au long du mois. [Notre] objectif est très simple : attirer les talents et fidéliser les collaborateurs après la crise* sans précédent que le secteur de la Restauration vient de traverser en leur offrant un cadre de travail plus serein.”
*Crise liée à la pandémie du Covid 19.
- Bio SAS “Nous sommes une société plutôt jeune avec une moyenne d’âge de 30/35 ans. En mettant en place l’acompte sur salaire, on voulait simplifier la vie de nos salarié·es” explique Charles de Bailliencourt, le CEO. Côté salarié·es, les retours sont également positifs : “Je fais ma demande le soir et le lendemain j’ai le versement qui arrive sur mon compte, c’est bien pratique” explique par exemple l’un d’entre eux. En plus de permettre aux collaborateurs de reprendre le contrôle de leurs finances, c’est également un bon moyen pour instaurer un climat bienveillant dans la structure.
Ce que l’on en retient ? La flexibilité et l’esprit plus léger pour les salarié·es sont des avantages non négligeables du salaire à la demande. Et niveau inconvénient ? Faire la demande peut s’avérer gênant pour certaines personnes. La solution ? Afin de dépasser cette barrière psychologique, certaines applications ont digitalisé cette pratique. C’est notre cas chez Nesspay : nous proposons une solution en un clic et discrète pour retirer une portion de son salaire déjà gagné. En plus, côté RH, tout est connecté et automatisé. Notre outil “clef en main” s’intègre dans vos solutions de paie, sans rien faire bouger. Idéal pour éviter les erreurs liées au manuel.
Les politiques de rémunération sont donc de vrais leviers d’attractivité et de performance. Mettre en place des actions concrètes dans ce sens peuvent faire pencher la balance en votre faveur pour attirer de nouveaux talents et fidéliser les autres.
Pour aller plus loin : WelcometotheJungle, média spécialisé sur le futur du travail, a publié un dossier entièrement consacré à la politique salariale comme atout de la marque employeur. Un concentré de conseils et de témoignages concrets.